Agissez pour ce monde comme si vous deviez vivre mille ans, et pour l'autre comme si vous deviez mourir demain. [Mahomet]
ABEILLESPASSION - 1 a 11 L APICULTURE POUR TOUS
 

(1) LA MORT DES ABEILLES MET LA PLANETE EN DANGER
(2) DES RUCHES EN BONNE SANTE.
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Document sous licence Creative Commons 


Abbé Warré

 

L'APICULTURE
POUR TOUS

°

L'APICULTURE
FACILE ET PRODUCTIVE


 

Douzième édition
Reproduction
1

L'Abbé Warré est décédé en 1951. D'après la loi sur la propriété intellectuelle2, ses héritiers doivent donner leur autorisation pour la diffusion de ses écrits.

N'ayant pu contacter ses héritiers, je me permets de diffuser son livre pour un accès à tous et à toutes, et pour que ce type d'apiculture se fasse connaître.

Guillaume Fontaine

Chapitre 1
L’utilité de l’apiculture

L’apiculture est l’art de cultiver les abeilles dans le but de retirer de cette industrie le maximum de rendement avec le minimum de dépenses.

Or, les abeilles produisent des essaims et des reines, de la cire, du miel.

La production des essaims et des reines doit être réservée aux spécialistes.

La production de la cire a quelque importance, mais diminuée par les frais de sa fonte.

La production du miel est le principal but de l’apiculture, celui que vise avant tout l’apiculteur, parce que ce produit est important et qu’il peut être pesé, estimé.

Or, le miel est un excellent aliment, un bon remède, le meilleur des sucres. Nous le redirons plus longuement. Et ce miel, on peut le vendre, comme on peut le consommer sous bien des formes : en nature, en confiseries, en pâtisseries, en boissons hygiéniques et agréables : hydromel, cidres sans pommes, vins sans raisins.

L’apiculture est aussi, il faut le noter, un travail passionnant, qui repose par conséquent l’esprit et même le corps.

L’apiculture est encore un travail moral, puisqu’il éloigne du café et des mauvais lieux et qu’il met sous les yeux de l’apiculteur l’exemple du travail, de l’ordre, du dévouement à la cause commune.

L’apiculture est en plus un travail souverainement hygiénique et bienfaisant, car ce travail se fait le plus souvent en plein air, par beau temps, au soleil. Or, le soleil est l’ennemi de la maladie puisqu’il est le maître de la sève et de la force. Le docteur Paul Carton a écrit : «  Ce qu’il faut, c’est enseigner à la génération qui vient la haine de l’alcool, le mépris de la viande, la méfiance du sucre, la joie et la haute valeur du mouvement.  »

Car l’homme est un composé. Son corps a besoin d’exercice ; sinon il s’atrophie. Son intelligence a également besoin d’exercice ; sinon elle s’annihile. L’intellectuel va à la déchéance physique. L’ouvrier, derrière sa machine, va à la déchéance intellectuelle.

Le travail de la terre est celui qui répond le mieux aux besoins de l’homme. L’intelligence et le corps y trouvent leur part.

Or, dans une société, il faut des intellectuels, des employés de bureau, des ouvriers pour conduire les machines. Évidemment ces hommes ne peuvent conduire une ferme. Mais aux heures libres (et ils doivent en avoir), ils peuvent jardiner et faire de l’apiculture et ainsi satisfaire aux besoins de leur nature.

Ce travail vaudrait mieux que tous les sports modernes avec leurs excès, avec leurs promiscuités, avec leurs nudités.

Si les Français retournaient ainsi à la terre, ils seraient plus forts et plus intelligents. Et, comme l’a dit le sage Engerand, la France redeviendrait la terre de l’équilibre, où il n’y aurait ni les fièvres, ni les folies collectives si néfastes aux hommes, elle redeviendrait un pays de mesure et de clarté, de raison et de sapience, une contrée où il fait bon vivre.

Et puis n’oublions pas le mot d’Edmond About : « Le seul capital éternel, inusable et inépuisable, c’est la terre. »

Enfin, et c’est une chose importante, l’abeille féconde les fleurs des arbres fruitiers. L’apiculture contribue, par conséquent, pour une large part, à remplir notre fruitier. Cette raison seule devrait suffire pour pousser à l’apiculture, tous ceux qui ont le moindre coin de verger.

D’après Darwin, la fécondation d’une fleur par elle-même n’est pas la règle générale. La fécondation croisée qui intervient le plus communément est nécessitée, soit par la séparation des sexes dans les fleurs ou même sur des pieds différents, soit par la non-coïncidence de la maturité dans le pollen et dans le stigmate ou par des dispositions diverses qui empêchent une fleur de se féconder elle-même. Il en résulte que bien souvent, si une cause étrangère n’intervient pas, nos plantes ne donneront pas de fruits ou en donneront beaucoup moins ; de nombreuses expériences l’ont démontré.

Or, l’abeille, comme le dit si bien M. Hommell, l’abeille, attirée par le nectar sécrété à la base des pétales, pénètre jusqu’au fond des enveloppes florales pour se repaître des sucs élaborés par les nectaires et s’y couvre de la poussière fécondante que les étamines laissent tomber sur elle. La première fleur épuisée, une seconde offre à l’infatigable ouvrière une nouvelle moisson ; le pollen qu’elle porte tombe sur le stigmate et la fécondation qui, sans elle, serait livrée aux hasards des vents, s’opère d’une manière certaine. Poursuivant ainsi sans relâche sa course, l’abeille visite des milliers de corolles et mérite le nom poétique, que Michelet lui donne, de pontife ailé de l’hymen des fleurs.

M. Hommell essaie même de chiffrer le bénéfice qui résulte de la présence des abeilles. Une colonie, dit-il, qui ne dispose que de 10 000 butineuses doit être considérée comme atteignant à peine la moyenne et une famille très forte logée en grande ruche en possède souvent 80 000. Supposons que 10 000 butineuses sortent chaque jour 4 fois ; en 100 jours cela fera 4 millions de sorties ; si chaque abeille, avant de revenir au logis, entre seulement dans 25 fleurs, les abeilles de cette ruche auront visité dans le cours d’une année 100 millions de fleurs. Il n’est pas exagéré de supposer que, sur 10 de ces fleurs, une seule au moins soit fécondée par l’action des butineuses et que le gain qui en résulte soit de 1 centime seulement par 1 000 fécondations. Eh bien, malgré des évaluations si minimes, il ressort un bénéfice de 100 fr. par an produit par la présence d’une seule ruche. Cette conclusion mathématique est sans réplique.

Certains producteurs de fruits, des viticulteurs surtout, s’élèvent contre les abeilles, parce qu’elles vont sucer le jus sucré des fruits et des raisins. Mais si l’on examine attentivement l’abeille, on s’aperçoit vite qu’elle délaisse les grains intacts et qu’elle ne vide que ceux dont la pellicule a déjà été perforée par les oiseaux ou les mandibules puissantes des guêpes. L’abeille ne recueille qu’un suc qui, sans elle, se dessécherait en pure perte. L’abeille est même dans l’impossibilité absolue de commettre le vol dont on l’accuse : les pièces masticatrices de sa bouche ne sont pas assez puissantes pour lui permettre de perforer la pellicule qui protège la pulpe.

Chapitre 2
Les bénéfices en apiculture

Je plains ceux qui ne font de l’apiculture que pour s’enrichir. Ils se privent de bien douces jouissances.

Toutefois l’argent est nécessaire pour vivre. L’argent est utile à ceux qui aiment semer le bonheur autour d’eux.

Il y a donc lieu d’envisager ce que peut rapporter l’apiculture.

Or, la lecture de certains livres et de certains journaux peut induire en erreur sur ce point.

Les mensonges

Pour encourager le retour à la terre ou pour conduire aux déceptions ceux qui y retournent, des apiculteurs en chambre ou des antifrançais font imprimer dans les journaux des choses renversantes. Parfois aussi des apiculteurs égoïstes accusent des résultats inférieurs pour ne pas se créer de concurrents.

Ainsi un dignitaire en apiculture prétend qu’une récolte de 10 kg est un rare maximum. Par contre, un professeur prétend que les récoltes de miel devraient être portées en moyenne à 100 kg par ruche par l’adoption de méthodes rationnelles.

Un docteur déclare qu’en Amérique une ruche peut donner une récolte moyenne annuelle de 190 kg de miel, qu’il ne tient qu’à nous d’en faire autant.

Sans doute en donnant à chaque ruche 200 kg de sucre. Mais la répression des fraudes n’interviendrait-elle pas ?

La vérité

Aucune ruche, aucune méthode ne change les pierres en miel, ni ne donne l’intelligence à l’apiculteur, ni n’augmente la fécondité de la reine, ni n’améliore la température. Par conséquent, le rapport d’une ruche variera d’une région à l’autre, d’une ruche à l’autre, d’une année à l’autre, comme la richesse mellifère de la région, comme la fécondité de la reine, comme la température, comme l’habileté de l’apiculteur.

Quand j’habitais la Somme, je faisais une récolte moyenne de 25 kg par ruche. Dans une région mellifère on peut récolter davantage. Ici, à Saint-Symphorien, dans un quartier très peu mellifère, je ne fais qu’une récolte moyenne de 15 kg. Précisons. En 1940 j’avais des ruches qui m’avaient coûté 300 fr. l’une. Elles m’ont donné chacune une récolte de 15 kg. Or, le prix du miel était fixé à 18 fr. en demi-gros, à 22 fr. au détail. Par ailleurs, chaque ruche ne m’avait demandé qu’une heure et demie de travail dans le cours de l’année.

On voit par là comment le travail et le capital sont payés en apiculture, même dans une région peu mellifère.

Chapitre 3
L’apiculture est une bonne école

Le bonheur, a dit Coppée, c’est d’en donner. Bonheur acquis pour les âmes d’élite. Or, ce bonheur n’est pas toujours possible, mais on peut trouver un bonheur considérable dans la nature.

La fleur c’est la beauté qui se rajeunit sans arrêt. Le chien c’est la fidélité sans borne, même dans l’infortune, la reconnaissance sans oubli. L’abeille c’est une maîtresse et charmante éducatrice. Elle donne l’exemple d’une vie sage et raisonnée qui console des contrariétés de la vie.

L’abeille se contente de la nourriture que lui fournit la nature aux alentours de sa ruche, sans y rien ajouter, sans en rien retrancher. Pas de plats cuisinés, pas de primeurs d’outre-mer.

L’abeille, si riche soit-elle de provisions, ne consomme que ce qui lui est strictement nécessaire. Pas d’excès de table.

L’abeille se sert de son terrible aiguillon, et jusqu’à la mort, pour défendre sa famille et ses provisions. Ailleurs, même quand elle butine, elle cède aux hommes et aux animaux la place dont ils ont besoin, pacifiquement, sans récrimination, sans lutte. C’est une pacifiste sans faiblesse.

Chaque abeille a sa besogne, conforme à son âge et à ses aptitudes. Elle la remplit sans envie, sans révolte et sans colère. Pour l’abeille, il n’y a pas de travail humiliant.

La reine, inlassablement, pond, assurant ainsi la perpétuité de la race. Les ouvrières, avec amour, partagent leur activité entre les tendres larves, espoirs des essaims futurs, et les champs embaumés où, de l’aube au crépuscule, s’opère la récolte du miel. Point de place, dans le bourdonnant essaim, pour les inutiles. Pas de parlementaires ; car ce peuple discret n’a pas le goût des lois nouvelles ni le loisir des discours vains.

Nous appelons reine l’abeille pondeuse. C’est indûment. Il n’y a ni roi, ni reine, ni dictateur dans la ruche. Personne ne commande, mais tous travaillent dans l’intérêt commun. Pas d’égoïsme.

L’abeille observe la loi aussi hygiénique qu’impérieuse, loi souvent oubliée par les hommes : « C’est à la sueur de ton front que tu gagneras ton pain.  » Et je constate que la sueur de l’abeille, tout en assainissant son corps, lui est encore d’une autre utilité. Sa sueur, en se changeant en paillettes de cire, fournit à l’abeille les matériaux qui lui serviront à construire ses admirables cellules : grenier sain pour ses provisions, doux berceau pour sa progéniture. Tant il est vrai que l’observation des lois naturelles est toujours récompensée.

Et l’abeille travaille sans répit, jour et nuit. Elle ne prend de repos que lorsque le travail fait défaut. Pas même de repos hebdomadaire. Chez les abeilles il n’y a ni rentiers ni retraités.

Et voyez la devise de l’abeille qu’a chantée Théodore Botrel

J’ai dit un jour à l’abeille
Repose-toi donc un peu,
T’efforçant d’être pareille
À ce gai papillon bleu
Sur la rose ou la pensée,
Vois, il pâme en rêvassant
Oui... mais, moi, je suis pressée,
M’a dit l’abeille, en passant.
Lui montrant la libellule,
Je lui dis, un autre jour
Viens, de l’aube au crépuscule,
Danser comme elle, à ton tour
Ne l’admires-tu, subtile,
Valsant, là-bas, sur l’étang ?
Si... mais, moi, je suis utile
M’a dit l’abeille, en partant.
Hier, enfin, devant la porte
De son petit temple d’or
Je l’aperçus, demi-morte,
Lourde de son pollen encore :
Repose-toi, pauvre bête
Lui dis-je en la secourant
Oui... puisque ma tâche est faite,
M’a dit l’abeille, en mourant.

 

travail

Ce que j’admire le plus chez l’abeille, a dit Henry Bordeaux, c’est son oubli d’elle-même : elle se donne tout entière à une œuvre dont elle ne jouira pas : joie dans l’effort et don de soi.

Et pour moi les abeilles sont ce qu’étaient les oiseaux pour André Theuriet.

Quand j’entends les abeilles bourdonner dans la feuillée, je songe, avec une douce émotion, qu’elles chantent de la même façon que celles que j’écoutais dans mon enfance, au jardin paternel.

Les abeilles ont cela de bon qu’elles semblent toujours être les mêmes. Des années passent, on devient vieux, on voit ses amis disparaître, les révolutions changer la face des choses, les illusions tomber l’une après l’autre, et, cependant, parmi les fleurs, les abeilles qu’on a connues dès l’enfance modulent les mêmes phrases musicales, avec la même voix fraîche. Le temps ne semble pas mordre sur elles, et, comme elles se cachent pour mourir, comme nous n’assistons jamais à leur agonie, nous pouvons nous figurer presque que nous avons toujours devant les yeux celles qui ont enchanté notre première jeunesse, celles aussi qui, pendant notre longue existence, nous ont procuré les heures les plus agréables et les amitiés les plus rares.

Comme l’a dit un amant de la nature : Heureux celui qui, le soir, couché dans l’herbe auprès du rucher, en compagnie de son chien, a entendu le chant des abeilles se mariant au cri-cri des grillons, au bruit du vent dans les arbres, au scintillement des étoiles, à la marche lente des nuages !

Chapitre 4
L’abeille

Place de l’abeille dans la nature

Les animaux, qui se distinguent des végétaux parce qu’ils sont doués de mouvement, se partagent en deux grandes catégories : les vertébrés et les invertébrés.

Les vertébrés, caractérisés par une colonne vertébrale, comprennent les poissons, les batraciens, les reptiles, les oiseaux et les mammifères ; ils ne nous intéressent pas ici.

Les invertébrés, qui n’ont pas de colonne vertébrale, comprennent plusieurs embranchements : les protozoaires (les infusoires), les spongiaires (les éponges), les cœlentérés (les méduses, les coraux), les échinodermes (les étoiles de mer), les vers (les sangsues, les lombrics), les vermidiens, les mollusques (les huîtres, les limaces, les pieuvres), les arthropodes et enfin les chardés qui, par leur corde dorsale, établissent la transition entre les invertébrés et les vertébrés.

Ce sont les arthropodes qui nous intéressent.

Les arthropodes (du grec « arthron », articulation, et « pous, podos », pied) sont aussi appelés articulés. Leur corps présente trois régions distinctes : la tête, le thorax et l’abdomen. Ils sont munis d’appendices : à la tête, les antennes et organes masticateurs ; au thorax, les membres ambulatoires.

On divise les arthropodes en plusieurs classes : les crustacés (les homards), les arachnides (les araignées), les myriapodes (les scolopendres), les insectes ou hexapodes.


insecte

Fig. 4.1: Un insecte


bourdon, nid, osmie

Fig. 4.2: A : Bourdon, B : Nid de Bourdon, C : Osmie.


mère,ouvrière,mâle

Fig. 4.3: De haut en bas : Une mère — Une ouvrière — Un mâle (grandeur naturelle)

Les insectes (du latin « in, » dans, « secare », couper), ou hexapodes (du grec : « hex », six, et « pous, podos », pied), se caractérisent par leurs membres qui sont toujours au nombre de six. Les insectes ont une respiration aérienne.

Leur tête porte deux yeux composés. Le thorax se divise en trois parties le prothorax, qui porte une paire de pattes ; le mésothorax, qui porte une paire de pattes et une paire d’ailes ; le métathorax, qui porte une paire de pattes et parfois une paire d’ailes. Les insectes ont toujours leurs sexes séparés. La larve, au sortir de l’œuf, doit subir une série de métamorphoses pour arriver à ressembler aux parents. Par leur intelligence et leur organisation, les insectes sont supérieurs aux autres invertébrés. Les six cent mille espèces d’insectes connus sont réparties en huit ordres : les orthoptères (sauterelles), les névroptères (fourmis-lions), les archiptères (les libellules), les hémiptères (les punaises), les diptères (les puces), les lépidoptères (les papillons), les coléoptères (les hannetons) et les hyménoptères.

Les hyménoptères (du grec : « humen », membrane, et « pteron », aile) sont caractérisés par quatre ailes membraneuses.

Les hyménoptères forment la classe des insectes la plus hautement organisée au point de vue de l’intelligence, à tel point que ses manifestations confondent la nôtre. Et pourtant nous ne connaissons encore qu’imparfaitement leurs qualités, comme leur nombre d’ailleurs, car les vingt cinq mille espèces connues permettent d’entrevoir le nombre de deux cent cinquante mille espèces.

Les hyménoptères comprennent deux groupes : les térébrants et les porte-aiguillon.

Les térébrants possèdent une tarière abdominale dont ils se servent pour scier ou perforer les végétaux. C’est dans ce groupe que sont classés les « cepus », dont on trouve la larve dans le chaume qui porte l’épi de blé, et la « lydia piri », dont les larves filent une sorte de réseau de soie englobant plusieurs feuilles de poiriers.

Les porte-aiguillon portent un aiguillon au bout de l’abdomen. Les uns sont des parasites, dont la mission est souvent de détruire des insectes nuisibles, ou des chasseurs comme la guêpe vulgaire ou le gros frelon, dont les larves ont besoin d’un apport d’insectes ou de viande, et de fouisseurs (philanthe apicore) qui fouillent souvent la terre pour y trouver les larves dont ils se nourrissent, qui dévorent aussi beaucoup d’abeilles.

Les autres sont des formicides ou fourmis, insectes les mieux doués au point de vue de l’intelligence après les abeilles, et enfin les apides.

Les apides ou mellifères, ce sont les abeilles. Elles nourrissent leurs larves de miel. Il y en a environ 1 500 espèces. Les unes vivent solitaires, comme l’osmie, dans des trous de murailles, des cavités de vieux bois. Les autres se réunissent en société, ce sont les abeilles sociales : les bourdons, les mélipones et l’abeille ordinaire ou « apis mellifica ».

Les bourdons (du latin « burdo », mulet), de grande taille, très velus, ne vivent qu’en petits groupes et font leur nid sous la terre.

Les mélipones, très petites, vivent en colonies très nombreuses, parce qu’elles ont plusieurs reines, mais seulement dans les pays tropicaux.

L’abeille ordinaire, « apis mellifica », est celle dont nous allons nous occuper longuement.

Composition de la famille de l’abeille

Les familles que forment les abeilles s’appellent colonies. Chaque colonie comprend trois sortes d’individus

  1. Une seule femelle, complètement développée et capable de pondre assez d’œufs pour assurer le maintien et l’accroissement de la famille c’est la mère, appelée improprement « reine » ;
  2. Les ouvrières ou femelles atrophiées, incomplètement développées, en nombre considérable, cent mille et plus ;
  3. Des mâles, qui n’apparaissent normalement que pendant la saison des essaims et disparaissent dès que cessent les apports du miel. Leur nombre varie de quelques centaines à quelques milliers.

Tailles comparatives

La mère, les ouvrières et les mâles varient de taille. Le tableau ci-dessous la donne approximativement1

  Longueur Largeur
des ailes
ouvertes
Diamètre
du corselet
Mère 16 24 4,0
Ouvrières 12 23 3,5
Mâles 15 28 4,5

Transformations comparatives

Les habitants de la ruche se transforment de façons différentes.
La reine est sous forme d’œuf pendant trois jours, de larve pendant cinq jours, de nymphe (dans cellule operculée) pendant huit jours. La naissance a lieu le seizième jour. Elle est fécondée vers le septième jour après sa naissance. Elle commence à pondre deux jours plus tard, soit au minimum vingt-cinq jours, le plus souvent trente jours après la ponte de l’œuf.
L’ouvrière est sous forme d’œuf pendant trois jours, de larve pendant cinq jours, de nymphe (dans cellule operculée) pendant treize jours. La naissance a lieu le vingt et unième jour. Elle reste dans la ruche, comme nourrice ou cirière, environ quinze jours. Elle commence à butiner trente à trente-six jours après la ponte de l’œuf.
Le mâle est sous forme d’œuf pendant trois jours, de larve pendant six jours et demi. La naissance a lieu le vingt-quatrième jour. Il est apte à la reproduction vers le cinquième jour après sa naissance, soit environ un mois après la ponte de l’œuf.

N. B.

Si l’on supprime la mère d’une colonie, laissant aux abeilles le soin de la remplacer, celles-ci, pour épargner du temps, opèrent presque toujours sur des larves âgées de deux jours, de sorte que les jeunes reines arrivent à terme le douzième jour après l’enlèvement de la vieille reine.

Chapitre 5
La mère

Nom de la mère

D’anciens auteurs enseignaient que les colonies d’abeilles sont gouvernées par des rois. Nous savons aujourd’hui qu’il existe dans chaque colonie une reine, ou mieux une mère, car, de fait, cette reine n’est qu’une femelle complète, fécondée, capable d’assurer par sa ponte l’avenir de la famille. Le grand chef de la colonie c’est l’intérêt général. Nous nous conformerons toutefois à l’usage : la mère de la colonie, nous l’appellerons reine.

Nombre de reines

Généralement, il n’y a qu’une reine dans une colonie. Plusieurs fois, pourtant, nous avons vu deux reines dans une colonie. D’autres apiculteurs ont affirmé en avoir vu trois. Ces exceptions peuvent se produire dans plusieurs cas. Une reine trop vieille n’a plus l’énergie d’aller tuer sa fille à sa naissance, comme son instinct l’y avait poussée antérieurement. Ou bien, on a introduit successivement plusieurs reines dans une colonie qu’on croyait orpheline. Les reines se sont trouvées séparées, poussées par les abeilles, dans des directions différentes. De fait, elles ont formé dans la colonie des groupes différents, ayant chacun les éléments d’une colonie. Cet état disparaît aussitôt que les groupes se rapprochent l’un de l’autre, soit par le développement des deux groupes, soit par l’arrivée du froid. Le désordre créé par la sortie des essaims secondaires favorise la présence momentanée de plusieurs reines écloses en même temps.

Antipathie des reines

Quand deux reines se rencontrent, elles se précipitent l’une sur l’autre. La plus forte, ou la plus habile, transperce la plus faible d’un coup d’aiguillon dans l’abdomen. La mort en est la conséquence. Parfois, les deux reines se transpercent mutuellement, comme il arrive à deux duellistes, et se tuent.

Cette antipathie existe entre toutes les reines, qu’elles soient fécondées, vierges ou même encore enfermées dans leur cellule.

Quand les abeilles élèvent des reines pour un motif quelconque, elles édifient plusieurs cellules royales, dix à quinze. Or, la reine éclose la première se hâte d’atteindre les alvéoles où ses sœurs préparent leur naissance, et elle les frappe de son dard.

Je vois là un moyen de sélection sévère, donné à l’abeille par la nature. Une seule reine est conservée sur dix ou quinze. Or, cette reine, c’est celle qui, la première, est parvenue à soulever le couvercle de sa cellule : c’est la plus vigoureuse.

Disparition de la reine

Dans la visite des ruches, on voit fréquemment une pelote d’abeilles serrées fortement. Si on écarte ces abeilles par la force ou par une fumée très abondante, on trouve au milieu une reine. Une telle reine est dite emballée.
Cette étreinte des abeilles a pour cause la joie ou l’antipathie.

Quand l’apiculteur a maintenu la reine trop longtemps séparée de la colonie, quand il n’a pas favorisé assez vite la sortie d’une reine de la cage d’introduction, quand il y a pillage et danger pour la reine, les abeilles, dans leur joie excessive, s’empressent autour de la reine aussitôt qu’elles le peuvent, elles la serrent, l’étreignent et l’étouffent.

D’autres fois, cette étreinte a pour cause l’antipathie ; elle est accompagnée de coups de dards et suivie d’une mort plus rapide.

Ce fait a lieu pour les vieilles reines infécondes, peu de temps avant l’éclosion de leur remplaçante ; pour les reines dont l’apiculteur, en les conservant trop longtemps entre les doigts ou dans la main, a changé le parfum particulier qui permet à leur peuple de les reconnaître ; pour les jeunes reines qui, au retour de la fécondation, entrent dans une ruche étrangère trop rapprochée.

Conséquences de la disparition de la reine

La colonie dépourvue de reine est appelée orpheline. Si la reine disparue n’est pas remplacée par l’apiculteur ou par les abeilles, la population de la colonie diminue rapidement, jusqu’à disparaître.

Importance de la reine

Sa présence est nécessaire puisque, seule, la reine pond les œufs destinés à assurer la perpétuité de la famille. Aussi la nature a-t-elle pris toutes les mesures pour protéger sa vie.

L’accouplement de la reine a lieu en vol, dans les airs. Ces circonstances rendent cet acte dangereux pour un insecte aussi fragile que l’abeille. Aussi est-il unique.

L’abeille ne rencontre le mâle qu’une seule fois dans sa vie. Et plus jamais, par la suite, elle ne quittera ses rayons, si ce n’est au milieu d’un essaim qui va fonder un nouveau foyer.

Durée de la vie de la reine

La durée de la vie de la reine est de quatre à cinq ans ; c’est environ cinquante fois celle des ouvrières, nées au commencement de la miellée. Comme la poule, c’est la deuxième année qu’elle pond le plus.

Âge de la reine

Il est assez facile de distinguer les vieilles reines des jeunes. Les jeunes reines d’un à deux ans ont l’abdomen plus gros, parce que gonflé d’œufs, leurs ailes sont intactes ; leur tête et leur corps sont couverts de poils, leurs mouvements sont vifs. Les vieilles reines de trois ans sont glabres ; leurs ailes sont frangées ; leur démarche est lente.

Autorité de la reine

C’est une erreur de croire que la reine dirige la construction des rayons et distribue le travail aux ouvrières. Le rôle de la reine est tout simplement de pondre.

Il n’en est pas moins vrai que la présence de la reine est indispensable à l’activité de la colonie. Vu l’importance du rôle de la reine et la gravité de sa perte, dès qu’une ruche est orpheline, les ouvrières s’inquiètent, s’appellent, courent de tous côtés à la recherche de la reine ; elles travaillent moins, elles deviennent acariâtres. La situation s’aggrave encore s’il n’y a pas dans la ruche du couvain jeune permettant d’élever une autre reine.

Aussi, dans une colonie qui meurt de faim, c’est la reine qui survit le plus longtemps, sans doute parce que la reine est plus forte et plus résistante, mais aussi parce que les abeilles lui ont réservé la dernière goutte de miel.

Imperfections de la reine

La reine ne possède ni les organes sécréteurs de la cire, ni les appareils de récolte du pollen et du miel.

La reine ne sait même pas s’alimenter elle-même. Si on l’enferme seule dans une boîte avec du miel à sa portée, elle meurt de faim à côté du miel.

Il paraît en être de même dans la ruche. Les ouvrières fourniraient à la reine, pendant la ponte, une bouillie déjà élaborée par une première digestion, composée de miel et de pollen ; en dehors de la ponte, du miel pur. Toutefois, d’après le docteur Miller, ce n’est pas l’ouvrière qui fait passer la nourriture dans la bouche de la mère, parce que le dégorgement de la nourriture n’est possible qu’avec la langue repliée en arrière. C’est au contraire la reine qui introduit sa langue dans la bouche de l’ouvrière pour prendre dans son jabot la bouillie toute préparée.

Caractère de la reine

La reine est extrêmement timide et craintive. Le moindre bruit insolite l’effraye. Elle se cache souvent dans les recoins de la ruche où on peut l’écraser, où, en tout cas, il est souvent difficile de l’apercevoir. La reine n’ose même faire usage de son dard, sauf contre les jeunes reines.

Aspect de la reine

L’aspect de la reine permet de la trouver facilement. Elle est plus grosse et beaucoup plus longue que l’ouvrière. Son abdomen, de nuance plus claire, dépasse longuement les ailes. Sa démarche est plus majestueuse. Elle se distingue également du mâle par son corps plus svelte. Le mâle a le bout de l’abdomen plus obtus et plus couvert de poils, les ailes plus longues que l’abdomen.

Moyen de trouver la reine

Dans la Ruche Populaire avec la grille à reine, nous avons un moyen mécanique, absolu, de trouver la reine rapidement sans danger pour celle-ci, et sans que l’apiculteur ait de grandes connaissances apicoles.

Dans les ruches à cadres, il y a un autre moyen qui nous a toujours réussi dans notre élevage, pour trouver rapidement un grand nombre de reines, chaque jour de la belle saison.

Pendant la saison de ponte, la reine paraît traverser chaque jour l’espace occupé par le couvain, pour pondre dans toutes les cellules libres et allonger le groupe de couvain, suivant les possibilités. À minuit, la reine doit être toujours au milieu. En tout cas, à midi, la reine est toujours à une extrémité du couvain, un jour à droite, un jour à gauche. Il importe, pour n’avoir pas de mécompte, de ne pas effrayer la reine par des mouvements trop brusques ou par une fumée trop abondante, comme aussi de remettre toujours la reine sur le cadre où elle a été trouvée. Si on n’opère pas à midi, la reine est aussi éloignée de l’extrémité du couvain que l’est de midi l’heure de l’opération.

Certitude de la présence de la reine

Même sans l’avoir vue on est certain de la présence de la reine dans une ruche s’il s’y trouve du couvain d’ouvrières en larves, mais plus particulièrement en œufs nouvellement pondus et aussi si les abeilles vont et viennent, apportant du pollen au retour.

Odeur de la reine

On attribue à la reine une odeur forte, tenant de la mélisse, particulière, que les abeilles de la colonie prendraient plus ou moins.

Chapitre 6
Les mâles

Nom des mâles

Les mâles sont généralement appelés faux bourdons, parce qu’en volant ils font entendre un bruit plus fort que celui de l’abeille et tout à fait différent. Ce nom distingue aussi les mâles des bourdons des champs.

Particularités des mâles

Les mâles sont plus noirs. Les extrémités de leur corps sont plus velues. Les pattes sont dépourvues d’appareil pour la récolte du pollen. Ils n’ont point d’aiguillon. Ils exhaleraient une odeur distincte.

Odeur des mâles

Au moment de l’essaimage, les mâles exhaleraient une odeur plus forte. Ce serait pour la jeune femelle un moyen de les reconnaître, en plus du bruit qu’ils font entendre en volant. Cette odeur permet, d’ailleurs, de prévoir la sortie des essaims.

Mœurs des mâles

Les mâles sont doux et paisibles. Dans la ruche, ils semblent toujours sommeiller. Ils ne sortent que vers le milieu de la journée, et par temps beau et chaud. Ils passent parfois d’une ruche à une autre, sans que les abeilles s’en irritent.

Nombre des mâles

Dans les colonies en bon état il peut y avoir des mâles par milliers, jusqu’à 3 000.

Fonctions des mâles

La fonction incontestée des mâles est de féconder les jeunes femelles. Nous partageons l’avis de certains apiculteurs, que les mâles seraient encore plus utiles à entretenir la chaleur nécessaire à l’éclosion du couvain à un moment donné. Nous traiterons cette question quand nous parlerons des moyens de diminuer leur nombre ou de les supprimer.

Durée de l’existence des mâles

Les mâles, dans les climats tempérés, ne vivent que quelques mois. Ils apparaissent à l’approche de la miellée. Ils sont mis à mort par les ouvrières aussitôt qu’elle cesse. Ils sont, pour un temps, conservés, même en hiver, dans les ruches qui n’ont pas de reine.

Indication de la présence des mâles

La présence de nombreux mâles pendant la miellée paraît indiquer que la colonie est forte et donnera une abondante récolte si les circonstances sont favorables. Au contraire, la présence des mâles en dehors de la miellée indique, d’une façon certaine, que la colonie est en mauvais état, qu’elle est orpheline de reine, ou ne possède qu’une reine épuisée.

Chapitre 7
Les ouvrières

Fonctions des ouvrières

Les ouvrières exécutent les travaux d’édification et d’entretien de la ruche et les travaux d’alimentation. Elles s’occupent de l’élevage du couvain, de la garde de l’habitation, de sa propreté, de sa ventilation, etc.

Il n’y a pas lieu de distinguer les ouvrières selon leurs fonctions : nourricières, pourvoyeuses, cirières, etc. Les ouvrières sont toutes destinées indistinctement à tous les travaux utiles à la colonie, suivant les saisons, les heures, les circonstances. Seules les jeunes ouvrières s’occupent exclusivement des travaux d’intérieur, tant que leur corps n’est pas assez développé pour affronter les intempéries.

Heures de sorties

On a dit que les ouvrières sortent toute la journée au printemps, le matin seulement en été, jamais par la pluie et le froid.

Il est plus exact de dire que les ouvrières sortent quand la chose leur est possible, aussi souvent qu’elles ont quelque chance de trouver miel, pollen ou propolis.

Or la pluie alourdit tellement l’ouvrière qu’elle l’empêche de voler et au-dessous de 8 degrés, l’abeille est engourdie.

En été, l’ouvrière recherche surtout le miel. Or le soleil de midi sèche les fleurs.

Au printemps, c’est surtout le pollen que recherche l’ouvrière. Or ni la chaleur, ni le froid n’en arrêtent complètement la production.

Quelques chiffres

L’abeille pèse environ un dixième de gramme. Elle peut rapporter la moitié de son, poids, soit 0,05 g ; mais souvent elle ne rapporte que 0,02 g par voyage. Pour un apport de 1 kilogramme de miel, il faut donc que l’abeille fasse 50 000 voyages ou que 50 000 abeilles fassent un voyage. L’abeille peut faire par jour une vingtaine de voyages de 1 km aller et retour pour rapporter 0,40 g de miel. La récolte de 1 kg de miel représente donc plus de 40 000 kilomètres, soit plus que le tour du monde.

Durée de l’existence de l’ouvrière

Les ouvrières peuvent vivre au maximum un an quand se succèdent pour elles l’orphelinage et la mauvaise saison, c’est-à-dire des périodes où l’ouvrière a peu d’activité.

Pendant la bonne saison et dans les colonies normales, en raison de leur activité incessante, les ouvrières vivent deux à trois mois au maximum, souvent trois à quatre semaines seulement.

Mœurs des ouvrières

Chez les abeilles d’une même colonie on constate l’union et l’entente à un degré de perfection qui n’existe nulle part ailleurs. Car toutes les abeilles n’ont qu’un seul et même but, qu’une seule et même ambition : la prospérité de la colonie.

Pour le même motif, les ouvrières se défient des abeilles voisines. Elles les examinent et, sauf certains cas particuliers, quand elles ont reconnu qu’elles sont étrangères, elles les chassent et souvent les mettent à mort d’un coup d’aiguillon, sans se douter que cet acte de violence causera leur propre mort.

Polymorphisme des abeilles

La différenciation qui existe entre une ouvrière ou une reine vient-elle seulement de la forme de l’alvéole où se développe la larve et de son alimentation ? Qui oserait l’affirmer ?

S’il n’y avait ici qu’une question de développement plus ou moins complet, on pourrait admettre l’influence prépondérante de l’alimentation et du milieu. Mais il y a entre reine et ouvrière des divergences qui ne sauraient être attribuées au régime et au berceau. L’ouvrière possède certains organes tels que les corbeilles à pollen et les glandes cirières qui font défaut chez la reine, et cette dernière offre elle-même des particularités qu’on ne trouve pas chez l’abeille neutre. Or, cette dissemblance dans l’organisme ne peut être mise sur le compte du régime. Elle ne peut provenir que des nourrices, qui d’instinct savent quel traitement elles doivent faire subir à la larve d’où sortira une ouvrière pour qu’elle soit douée des organes nécessaires aux fonctions qu’elle aura à remplir ; elles savent également quel façonnement donner à une larve destinée à produire une reine pour retrancher chez elle ou atrophier des organes dont elle n’a pas besoin et développer au contraire ceux qu’exigeront ses fonctions maternelles.

C’est là une faculté prestigieuse qu’il nous faut admettre chez les éleveuses de la ruche, si nous voulons expliquer le polymorphisme des abeilles.

Chapitre 8
Ce que l’on voit aux alentours d’un rucher

Par une température propice à la miellée, il est facile de suivre le travail des abeilles, soit dans un champ, soit à la lisière d’un bois, et sans danger de piqûre, nous l’avons dit, car, loin de sa ruche, l’abeille ne pique jamais.

On peut même arriver à reconnaître ses propres abeilles, soit parce qu’elles sont d’une race qui n’existe pas dans la région, soit parce qu’à leur sortie de la ruche on les a saupoudrées d’une poudre quelconque, de farine par exemple.

Nectar

C’est avant tout le nectar que l’abeille recherche dans les fleurs. Arrivée sur une fleur l’abeille écarte les pétales, plonge sa tête dans l’intérieur de la fleur, allonge sa trompe et absorbe la gouttelette de nectar que nous aurions pu voir avant son passage.

Abeille butinant

Abeille butinant sur une fleur.

L’abeille passe ensuite à une autre fleur et opère de la même manière.

Il est à remarquer que plus le nectar est abondant et plus il y a de butineuses, que l’abeille ne paraît aller dans la même sortie que sur une seule et même variété de fleurs, que l’abeille a ses préférences et qu’elle abandonne une fleur visitée la veille par une autre abeille.

L’abeille ne récolte pas de nectar seulement sur les fleurs, mais aussi parfois sur des plantes, sur les stipules de la vesce par exemple et, en saison chaude parfois également sur les feuilles des chênes, bouleaux, hêtres, peupliers, tilleuls, etc. ; ce nectar s’appelle miellat.

Pollen

Les abeilles récoltent aussi du pollen dont elles se servent pour nourrir les larves. Les butineuses qui cherchent le nectar doivent ramasser, peut-être involontairement, une certaine quantité de pollen, mais il est certain que des butineuses recherchent le pollen sans s’occuper du nectar.

Les abeilles prennent le pollen avec leurs mandibules, le pétrissent, en font une boule, la prennent avec les pattes de devant pour la transporter dans les corbeilles des pattes de derrière.

Dans certaines fleurs, comme le genêt, l’œillette, il y a tant de pollen que le corps de l’abeille peut en être entièrement recouvert.

On ne voit jamais qu’une seule couleur au pollen apporté par une abeille. Il parait donc que l’abeille à chaque sortie ne visite qu’une seule et même variété de plante pour recueillir le pollen. Car la couleur du pollen varie avec chaque espèce de plante.

Propolis

Des butineuses vont aussi récolter la propolis sur les bourgeons de certains arbres : aunes, peupliers, bouleaux, saules, ormes, etc.

La propolis est une matière résineuse, transparente, collante. Les abeilles la rapportent par petites pelotes comme le pollen. Elles s’en servent pour boucher les fentes, combler les vides dans l’intérieur de la ruche.

Eau

Enfin certaines butineuses vont aussi chercher de l’eau qui leur sert à délayer la pâtée destinée aux jeunes abeilles, et aussi probablement à dissoudre le miel cristallisé.

Les abeilles ont des préférences étranges pour les gouttes de rosée du matin, l’eau de la mer, les eaux stagnantes qui ont reçu quelque peu de purin dans le voisinage des fermes.

Chapitre 9
Ce que l’on voit à l’entrée d’une ruche

Quand la température le permet, à l’entrée d’une ruche on peut voir des mâles ou bourdons et des ouvrières.

Bourdons

Les bourdons ne sortent qu’aux heures chaudes de la journée. Ils sont bruyants et volent sans but et lourdement quoique ne rapportant rien, ni miel ni pollen.

Ouvrières

Dès qu’il y a une température de 8 , on voit à l’entrée de la ruche des ouvrières toujours occupées, mais à des fonctions différentes. Les unes sont des gardiennes ou des ventileuses, les autres sont des nettoyeuses ou des butineuses.

Gardiennes

Les gardiennes vont et viennent devant l’entrée de la ruche ; elles surveillent les abeilles qui viennent du dehors et ne les laissent rentrer qu’après les avoir reconnues, sans doute par leur odeur. Elles pourchassent les abeilles, pourtant semblables, venues d’une autre ruche pour prendre le miel de la leur ; elles pourchassent aussi les guêpes, les frelons, les papillons «  tête de mort » qui essaient parfois de rentrer dans la ruche.

Ventileuses

Vers le soir des journées chaudes, surtout s’il y a des apports de miel, à côté des gardiennes, les ventileuses restent fixées la tête tournée vers l’entrée, dressées sur leurs pattes. Leurs ailes s’agitent rapidement et produisent un bruissement qu’on peut entendre d’assez loin. Leur but est de ventiler la ruche pour abaisser la température et aussi pour activer l’évaporation de l’eau contenue dans le miel, nouvellement apporté.

Nettoyeuses

Le matin, surtout au printemps, on voit aussi des abeilles sortir de la ruche, emportant au loin des débris de cire, des abeilles mortes, ce sont les nettoyeuses.

Butineuses

Enfin nous voyons sortir de la ruche les butineuses. Elles prennent leur vol rapidement, sans hésitation, dans une direction déterminée, se souvenant des fleurs visitées la veille. Elles rentrent lourdes et tombent parfois sur l’herbe avoisinant la ruche parce qu’elles sont chargées de miel. D’autres rentrent portant sur leurs pattes de derrière deux boules de pollen, jaunes ou de diverses couleurs, qu’elles ont recueillies sur les étamines des fleurs.

Soleil d’artifice

Par les journées chaudes, surtout après quelques jours de pluie, on voit souvent des abeilles voltiger autour de la ruche en cercles de plus en plus grands. Ce ne sont pas des butineuses, mais de jeunes abeilles qui font la reconnaissance de leur ruche et de son emplacement. Leur exercice s’appelle « soleil d’artifice ».

Barbe

Quand il fait très chaud, les abeilles manquant de place à l’intérieur de la ruche pour s’écarter les unes des autres se répandent au dehors en groupe devant l’entrée et même sous la ruche, attachées les unes aux autres par les pattes. On dit alors que les abeilles font la barbe. Elles font aussi la barbe quand elles se préparent à essaimer.


entrée ruche 1

Fig. 9.1: En avant, une abeille nettoyeuse emporte une abeille morte. Au milieu, deux bourdons, plus courts et plus gros. Près de l’entrée, deux ouvrières apportent du pollen qu’on voit à leurs pattes.


entrée ruche 2

Fig. 9.2: En avant, une gardienne fait la reconnaissance d’une abeille. Près de l’entrée, des ventileuses ventilent la ruche.


entrée ruche 3

Les abeilles font la barbe.

Chapitre 10
Ce que l’on voit à l’intérieur d’une ruche

Rayons

Ce qu’on perçoit d’abord dans une ruche, ce sont les plaques de cire creusées de cavités régulières. Ces plaques s’appellent rayons ou bâtisses ; ces cavités, cellules ou alvéoles. Les unes sont commencées, les autres terminées. Les rayons sont séparés par un intervalle d’un centimètre environ.



rayons


Fig. 10.1: Rayons commencés vus de face et de profil.



oeufs larves
Œufs et larves.
En haut, cellules non achevées, c. Puis cellule dont la reine est sortie normalement, ensuite, cellule operculée, renfermant une reine, b. Enfin cellule déchirée dont la reine a été tuée, d. Celluelñe de reine
Cellules de reine.

Cellules

Les cellules sont de dimensions différentes. Les cellules de mâles sont les plus grandes ; les cellules d’ouvrières sont les plus petites.

Il y a aussi des cellules irrégulières, dites cellules de raccord. Enfin il y a quelquefois des cellules de reine, d’une forme spéciale, ressemblant extérieurement à une cacahuète.

Les cellules peuvent avoir un couvercle appelé « opercule ». Les cellules non couvertes peuvent être vides ou contenir des œufs, des larves, du pollen ou du miel. Les cellules operculées contiennent du couvain si l’opercule est bombé et mat, du miel si l’opercule est plat et brillant.

Les œufs ont la position horizontale le premier jour, la position inclinée le deuxième, la position couchée le troisième. Les larves sorties des œufs varient de grosseur suivant leur âge.


cellules


Fig. 10.2: À gauche, cellules de bourdons. À droite, cellules d’ouvrière. Au milieu, cellules de raccord.



cellules


Fig. 10.3: À gauche, cellules de boudons operculées plus bombées et mates. À droite, cellules d’ouvrières operculées bombées et mates.

Habitants

Dans la ruche il y a évidemment une reine, des ouvrières et des mâles. Nous en avons parlé dans un précédent chapitre.

La reine n’a d’autre occupation que la ponte. Les ouvrières vaquent à différentes occupations : nourrir la reine et les larves ; apporter nectar, pollen, propolis et eau ; nettoyer les cellules et la ruche. Les mâles sont disséminés sur le couvain sans occupation apparente, probablement pour le chauffer. Aux heures chaudes où on visite la ruche, les mâles sont dehors ou dans les coins de la ruche pour ne pas gêner les abeilles.



Cellules

Chapitre 11
Les difficultés de l’apiculture

L’apiculture est utile et agréable : c’est incontestable. Pourquoi donc n’est-elle pas plus développée ? Car il n’y a pas d’abeilles, ou pas assez, partout où il y a des fleurs à féconder et du miel à butiner.

L’aiguillon de l’abeille est le premier obstacle. Les complications du matériel, comme les complications des méthodes, en sont un autre. Enfin, l’obstacle décisif, c’est le peu de bénéfice que semble laisser la pratique de l’apiculture.

Or, nous écrivons ce livre pour anéantir tous ces obstacles. Nous vous dirons la douceur de l’abeille. Nous vous donnerons les dimensions d’une ruche économique. Nous vous indiquerons une méthode simple, également économique. Nous vous garantissons, si vous suivez nos conseils, un bénéfice certain et important.


Abbé Warré












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